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Le médecin et le strapontin. (mémoires d'un coiffeur)

  • Photo du rédacteur: Arthur Baudon Vernet
    Arthur Baudon Vernet
  • 3 juil. 2023
  • 2 min de lecture

Dernière mise à jour : 5 juil. 2023

Tous les lundis matin, Monsieur Edouardo

ouvrait spécialement son salon de coiffure

pour le Docteur Raymond.

Invariablement entre 8h15 et 8h17, le son de ses petits pas

aux chaussures de randonnée au caoutchouc

trop épais envahissait la rue.

Il poussait la porte qui se mettait

à clique tiquer avec sa sonnette d’antan.

Et tous les lundis, il répétait la même phrase :

« Ah, il ne faut pas trainer !

Après, je dois aller voir ma mère. »

Edouardo le regardait d’un œil moqueur et amusé,

ou agacé d’un œil méchant suivant l’humeur du jour.

Le docteur Raymond, essayait de s’assoir

dans les vieux fauteuils qu’Edouardo

avait soigneusement récupéré

au cinéma du Centre quand il avait été détruit

pour y faire un MacDo.

Et comme chaque lundi depuis 8 ou 10 ans,

il demandait à Edouardo :

« Mais, comment on peut s’assoir,

je ne trouve pas l’assise ? »

que l’humeur soit mauvaise ou bonne,

cette phrase entendu des milliers de fois

le mettait immédiatement

dans l’état d’une cocotte-minute.

Le cœur passait de ses 80 à probablement

150 pulsations par minute, il s’imaginait

prendre son coupe chou comme un sabre de Kung Fu

pour trancher d’un seul coup

la carotide du docteur Raymond

et voir enfin son sang gicler sur les murs de son salon

comme dans un film de Tarantino.

Enfin assis dans le strapontin,

le docteur Raymond, comme tous les lundis,

commença sa litanie sur tous les problèmes

de santé de sa mère âgée de 99 ans,

de la sclérose en plaque de sa femme,

sans oublier de décrire avec moult détails le cas du patient

le plus sordide et nauséabond

qu’il avait traité la semaine passée.

Immédiatement, Edouardo dégainait son sèche-cheveux

comme on manipule un revolver

pour enlever les résidus capillaires inexistants

du non moins imaginaire client précédent

puisque le docteur Raymond était le premier.

Le bruit du moteur de l’engin

couvrait ses paroles insoutenables.

Reprenant son esprit et son sourire de commerçant,

Edouardo l’invita à s’assoir,

la coupe pouvait commencer avec les ciseaux.

 
 
 

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Arthur Baudon Vernet
auteur, artiste, philosophie, photographie, poesie, ecriture, ecrivain français
Montpellier, Occitanie, France, arthurbaudonvernet

 

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