La voile vole au-dessus de la mer grise.
La mouette reste à terre, écœurée
par cette voile bien plus grande que ses ailes.
Au loin, un drapé de nuages à la verticale,
il pleut sur l’horizon.
Moi, je ne pleure pas, emprisonné
dans toutes ces représentations de moi-même.
Mon nom, mon prénom, mes métiers,
mon enveloppe corporelle, mon visage, ma langue,
ma culture, mon milieu, mes connaissances,
mes centres d’intérêts, ma situation familiale,
mes amis, mes relations, mon âge,
mes possessions, autant de palissades derrières
lesquelles je suis enfermé.
Qui suis-je vraiment ?
Je sais maintenant,
maintenant je sais.
Je suis un être vivant vivant, qui rend hommage
à ses cinq sens et à son esprit en restituant,
aux autres, ce qu’ils ont trouvé sur son tamis
quand il s’est laissé transpercer par la rivière.
Les trésors ainsi collectés sont trop beaux
pour être gardé pour soi, d’ailleurs
ils proviennent du plus grand que moi
que j’ai finalement rencontré.
Il n'était pourtant pas bien loin, juste là.
Il ne s’agit pas d' exhiber ces joyaux,
mais de les partager,
comme une invitation pour que chacun
trouve le plus grand que soi par contagion.
La voile s’est tue,
la mouette à crié, et s’est envolée.
Quand à moi, je souris.
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