L’usage des mots reste singulier,
ils ont peu d’effets visuels, peu d’artifices.
En les prononçant, en les écrivant
ils scellent un signifiant apparemment sans doute,
sans marge d’erreur et pourtant,
ils laissent l’interprétation du lecteur totalement libre.
Ils sont stricts, mais ouverts,
rigides et pourtant souples avec le lisant.
Leur nature est proche de celle de l’eau.
Ils sont tour à tour dur, vaporeux,
transparents, opaques
et secs quand ils se sont évaporés.
Ils peuvent remplir et se vider.
Ils filent entre les pages comme entre les doigts.
Pourtant, ils impriment dans notre cerveau
une trace comme un pas dans l’argile humide.
Parfois, on voit mieux ensuite la trace de la semelle
que sur l’original de la chaussure.
Les mots servent aussi à ça,
ils pointent du doigt, attirent notre regard
sur ce qui est essentiel comme
pour nous éclairer la route, nous montrer le chemin.
Tous ces mots qui font des phrases,
des cailloux qui dessinent le chemin à suivre.
Certains plus tendus que d’autres
resteront plantés dans notre esprit.
D’autres disparaitront pour ressurgir
un jour peut-être pour en s’associer à un autre.
D’autres sortent plus souvent de cette réserve
qui grandit sans cesse alimentée
par les propos entendus, les écrits.
Un flux continue de mots
qui ne sont pas là seulement
pour désigner les choses
mais pour désigner l’élan de vie, le « vouloir dire ».
Ceux-là ont une volonté de nous faire comprendre
plus que ce qu’ils ne signifient vraiment.
Comme si certains criaient plus fort
pour se faire entendre
ou écartaient tous les autres
pour qu’on ne voit qu'eux
ou encore en gras, en capitale pour être sûr d'être vu.
Ce qui n’est pas non plus une garantie d’importance,
certains entre parenthèse auront parfois plus de poids,
sans compter ceux en italiques ou logé entre deux virgules.
Insaisissables vous dis-je comme l’eau ou l’anguille.
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